J'écris parce que je chante mal

Ces corps qui flottent facilement

     J’ai sauté tête première du bout du quai. La température de l’eau m’a à peine surpris. Je suis allé assez profondément pour sentir le poids de l’eau dans mes oreilles. Puis, j’ai regardé la surface. Par en dessous, comme je faisais depuis longtemps.

     Des bulles remontaient doucement au travers des rayons du soleil. Je me suis demandé si les gens qui périssaient noyés voyaient aussi ce spectacle. Est-ce que cette beauté adoucissait la brûlure de l’eau qui emplit les poumons ? Combien de secondes s’écoulent avant que ne cesse la douleur ? Pendant combien de vies reste-t-on conscient ? À quel moment regrette-t-on notre geste ?

     Pendant que je me posais ces questions, mon corps remontait doucement à la surface, sans coups de pied, sans mouvements de bras, malgré moi.