Panik

CHAPITRE 1

Dehors, toundra. Blanche. Toute blanche. La terre, le ciel. Pas d’horizon. Impossible de fixer quoi que ce soit. Les muscles oculaires ne savent plus.

L’aveuglement, le grand. Le blanc.

Lentement, le chasseur se meut dans la plaine désertique. Chacun de ses pas est effacé par le vent qui souffle qui souffle qui souffle. Des torsades infinies de poudrerie, les pages blanches d’une histoire sans mot.

L’homme n’a pas de visage. Seulement deux yeux bridés derrière des lunettes fumées entourées de givre. Il fait partie du blizzard, il est le blizzard. Il chante en inuktitut. Il sait que le vent couvre sa complainte. Il n’a pas à s’inquiéter.

Soudain, une tache brune, un hameçon pour l’œil dans le blanc sans fin. Un caribou seul, presque immobile, une proie facile pour l’homme à la carabine.

Il vise le cœur.

POW !

Le chasseur remercie la bête et continue de la regarder en chantant.

Les poils bruns et blancs du caribou frissonnent dans le vent. Un bloc de glace taillé à côté d’un traîneau. Il ne fondra pas avant longtemps. Longtemps.