Alimentation et vieillissement

introduction

Le présent ouvrage a d’abord été conçu pour le cours Alimentation et vieillissement offert au Certificat de gérontologie de la Faculté de l’éducation permanente de l’Université de Montréal. Bien qu’il s’adresse d’abord aux étudiants de ce programme, ce volume comprend des informations sus- ceptibles d’intéresser les personnes qui se préoccupent de nutrition et, en particulier, de son lien avec le vieillissement.

Mieux manger peut-il nous aider à mieux vieillir? Lorsque l’on se penche sur les principaux désordres observés au cours du vieillissement – par exemple, les maladies cardiovasculaires, l’ostéoporose ou le diabète –, on constate que la grande majorité d’entre eux sont liés à des questions de nutrition. En outre, on croit de plus en plus que les aliments que nous consommons dans nos années de jeunesse et de vie adulte préparent notre état de santé à 70 ans ou à 80 ans. L’ensemble des travaux réalisés au cours des vingt dernières années indique par ailleurs que, même à un âge avancé, la nutrition joue un rôle important dans l’état de santé et la qualité de vie des personnes. En revanche, un état nutritionnel pauvre participe à la morbidité, réduit l’autonomie et augmente les risques de mortalité.

Nous savons par ailleurs que les personnes âgées représentent un groupe à risque de problèmes nutritionnels. La sénescence s’accompagne en effet d’une gamme de changements d’ordre physiopathologique et environnemental susceptibles de nuire aux apports alimentaires et à l’équilibre nutritionnel. Parmi les problèmes les plus fréquents au sein des clientèles âgées, mentionnons la dénutrition, les carences nutritionnelles, la déshydratation et la constipation. De manière générale, ces problèmes comportent des conséquences pour la santé et la qualité de vie non seulement des personnes atteintes, mais aussi de leur entourage, et ils entraînent des coûts additionnels pour le réseau de la santé. La prévalence de ces désordres, notamment de la dénutrition, a d’ailleurs donné lieu ces dernières années au développement et à la mise en œuvre d’outils de dépistage. Dans les cas avérés, les problèmes nutritionnels sont par ailleurs accessibles à la thérapeutique dans le cadre d’une prise en charge globale.

Si une bonne nutrition aide à mieux vieillir, on est en droit de se demander s’il existe une alimentation permettant de nous maintenir en santé le plus longtemps possible. Si tel est le cas, de quoi cette alimentation idéale est-elle constituée? Comment l’alimentation actuelle des personnes âgées de 65 ans et plus s’y compare-t-elle? Le présent ouvrage aborde ces questions et tente d’offrir des éléments de réponse en s’appuyant sur les données issues de la pratique et des travaux de recherche réalisés ces dernières années. Cela dit, la relation nutrition/vieillissement demeure un sujet fort complexe, et plusieurs questions demeurent encore sans réponse. Cet ouvrage n’a d’autre prétention que de témoigner de l’état des connaissances actuelles.

Le contenu de l’ouvrage se répartit en 12 chapitres. Le chapitre 1 présente la science de la nutrition et la notion d’aliments, ce qui inclut les nutriments qui les composent. Il présente également les fondements du comportement alimentaire et tente de dégager les éléments qui caractérisent plus particulièrement celui des personnes âgées. Enfin, il aborde de manière générale le rôle de la nutrition comme déterminant de la santé au cours du vieillissement. Suivent les chapitres 2 à 4 qui présentent les notions de base en nutrition nécessaires à la compréhension des parti- cularités nutritionnelles inhérentes au vieillissement. Ainsi, le chapitre 2 discute des macronutriments (glucides, lipides et protéines), alors que les chapitres 3 et 4 traitent respectivement des vitamines et des minéraux. Dans chaque cas, on présente les caractéristiques chimiques des composés, on décrit leurs destinées métaboliques (absorption, distribution et excrétion), on discute de leur rôle dans l’organisme, on met en relief leur importance en regard de la santé et on identifie leurs principales sources alimentaires.

Les chapitres 5 et 6 traitent respectivement des principaux changements physiologiques ayant un impact nutritionnel et des facteurs susceptibles d’influer sur les apports nutritionnels. Plus spécifiquement, le chapitre 5identifie les changements dans la composition corporelle associés au vieillissement et leurs conséquences sur les besoins énergétiques et protéiques; il présente les modifications de l’appareil sensoriel et leurs conséquences sur le plan nutritionnel; il décrit le système digestif sénescent et l’impact des changements observés sur l’ingestion, la digestion et l’utilisation de certains nutriments; et il décrit les changements physiologiques pouvant expliquer l’anorexie associée au vieillissement.

Le chapitre 6 se concentre par ailleurs sur les facteurs d’ordre social (par exemple, les ressources financières, le niveau d’instruction, l’isolement social), psychologique (par exemple, la dépression et le deuil) et médical (par exemple, les atteintes de la cavité buccale, les incapacités fonctionnelles et la polymédication) les plus susceptibles d’influer sur les apports nutritionnels. Il présente leurs répercussions sur des éléments tels que l’approvisionnement alimentaire, l’appétit, les choix alimentaires, la qualité de la diète, etc.

Les chapitres 7 et 8 familiarisent le lecteur avec les quantités de nutriments qu’il serait souhaitable de consommer et avec les choix alimentaires à privilégier pour se maintenir en santé. Ainsi, le chapitre 7 s’intéresse aux recommandations nutritionnelles en vigueur au Canada (notamment les Apports nutritionnels de référence), et en particulier aux recommandations destinées aux personnes âgées de 50 ans et plus. Par ailleurs, le chapitre 8présente la dernière édition du Guide alimentaire canadien: Bien manger avec le Guide alimentaire canadien, publié en 2007. Ce guide constitue le principal document en matière d’éducation nutritionnelle au Canada.

Le chapitre 9 se propose de tracer un portrait de l’alimentation des aînés canadiens et québécois et d’en identifier les forces et les faiblesses. Puisant aux données d’une enquête nutritionnelle réalisée à l’échelle nationale en 2004 à partir d’un échantillon comprenant 35107 personnes provenant de chacune des provinces canadiennes, dont 4 780 du Québec, ce chapitre présente des données relatives aux apports nutritionnels, à la consommation, et aux habitudes alimentaires. Dans ce chapitre, on situe l’alimentation des aînés canadiens et québécois par rapport aux recommandations nutritionnelles et alimentaires en vigueur, on la compare à celle des adultes plus jeunes et on discute de son évolution au cours des trente dernières années.

Le chapitre 10 traite quant à lui de l’évaluation nutritionnelle, une intervention professionnelle qui permet de situer l’état de nutrition d’une personne par rapport aux standards de santé nutritionnelle et d’identi- fier les personnes dont l’état de nutrition est appauvri. En outre, l’évaluation nutritionnelle aide à établir un plan de soins et permet de suivre l’évolution de l’état nutritionnel du patient. Le chapitre 10 en décrit les fondements et les composantes, lesquelles s’appuient sur des données médicales, sociales et diététiques et comprend des mesures de nature anthropométrique, biochimique, clinique et fonctionnelle. Pour chacune des composantes, on discute des avantages et des limites, et on met en relief les particularités de leur application chez la personne âgée.

Enfin, les chapitres 11 et 12 traitent des principaux problèmes nutritionnels observés au cours du vieillissement et ils abordent la question de leur dépistage et de leur prise en charge. Plus spécifiquement, le chapitre 11 présente les problèmes que sont la dénutrition, les carences nutrition- nelles, la déshydratation et la constipation. Dans chaque cas, on discute des causes et des facteurs de risque, on en présente les manifestations cli- niques et on met en relief les conséquences pour la personne et le réseau de la santé. Les problèmes nutritionnels qui touchent les clientèles âgées étant d’autant plus faciles à traiter qu’ils sont identifiés dès les premiers stades de la maladie, le chapitre 12 présente quelques exemples d’outils de dépistage du risque nutritionnel couramment utilisés en pratique gériatrique, à savoir le Mini Nutritional Assessment (mna) et le Dépistage nutritionnel des aînés (dna). Ce chapitre, qui traite par ailleurs des fondements et des modalités pratiques de la prise en charge des problèmes nutritionnels les plus fréquents au sein des populations âgées, présente les ressources communautaires et institutionnelles permettant de traiter ces problèmes.