Clara : les désordres alimentaires à l'adolescence

Une découverte déstabilisante

Salut !

Je m’appelle Raphaël. J’ai 16 ans. Il y a plusieurs semaines, j’ai eu un conflit avec Clara, ma copine. Une vraie dispute! Avec les cris, les larmes et tout ce que tu peux imaginer... Tu veux savoir pourquoi? Ça peut paraître ridicule, mais voici : j’étais fâché qu’elle refuse sans cesse de venir souper chez moi, dans ma famille. Je me sentais tellement rejeté ! J’avais l’impression qu’elle ne m’aimait pas autant que je l’aimais. L’insécurité m’a poussé à faire quelque chose dont je ne suis pas très fier. En- fin. Pour les besoins de la cause, je vais laisser mon orgueil de côté et dévoiler ce que j’ai fait...

Alors qu’elle tapait sur son clavier d’ordinateur le mot de passe pour accéder à son courrier électro- nique, je l’ai espionnée du coin de l’œil. Je sais, je sais, c’est mal. Inutile de me le dire... Peut-être que ça t’est déjà arrivé aussi ? Tu imagines évidemment la suite. Un soir, alors que j’étais seul, j’ai ouvert tous ses messages pour les lire un à un. Je les scrutais à la loupe, à la recherche d’un indice qui me per- mettrait de confirmer cette horrible intuition qu’il y avait quelqu’un d’autre dans sa vie... ou qu’elle ne m’aimait plus, tout simplement. Mon cœur battait à tout rompre parce que je savais que ce que je faisais était mal... et parce que j’avais peur de ce que je pourrais découvrir !

Mais tu sais quoi ? Ce que j’ai découvert a été plutôt surprenant. Je dirais même déstabilisant! En même temps, c’était rassurant. Oui, oui, rassurant. J’ai enfin compris que ma belle Clara m’aimait... mais qu’elle souffrait beaucoup intérieurement. J’ai compris qu’elle luttait contre l’anorexie depuis plusieurs mois déjà. Oui, tu as bien lu ! L’ANOREXIE !

Tu sais, moi, je ne connaissais rien à ça. Je me suis mis à lire les courriels qu’elle avait échangés sur le sujet avec sa bonne amie Élizabeth, qui est en 5e secondaire. Éli et Clara habitent dans la même rue, alors elles sont amies depuis qu’elles sont toutes petites. Je connais bien Éli moi aussi et j’ai découvert qu’elle avait souffert de boulimie. La BOULIMIE! Ouf! Et quoi encore? Au fond, ces deux-là se comprennent à merveille puisqu’elles partagent une souffrance commune : les troubles alimentaires.

Sur le coup, j’ai été très surpris. Clara ne m’en avait jamais parlé. Apparemment, elle ne souhaitait pas que je le sache. Puis, j’ai senti mon cœur se remplir de chagrin à l’idée de la savoir si souffrante. J’ai poursuivi ma lecture jusqu’au bout... je ne pouvais plus m’arrêter! J’ai appris et compris tant de choses sur les troubles alimentaires. J’ai enfin saisi pourquoi elle refusait toutes mes invitations à souper et pourquoi je la sentais souvent tendue et anxieuse. Tout cela m’a fait le plus grand bien, je l’avoue.

Le lendemain, j’ai puisé au fond de moi le courage de tout lui admettre. Inutile de te dire qu’elle était en colère. Pour dire vrai, le mot est faible... elle était enragée ! Avec raison ! Mais par la suite, après quelques jours (qui m’ont paru des semaines) sans me parler, elle est revenue vers moi, avec douceur, pour m’annoncer que finalement, elle était à l’aise, voire soulagée que je sache ce qu’elle traversait.

Voilà donc ce qui m’amène à t’écrire aujourd’hui. J’ai eu la folle idée de te transmettre tous ces échanges de courriels entre ma copine Clara et son amie Élizabeth au sujet de leurs difficultés. Tu risques d’en avoir pour la soirée à lire, comme moi ! Elles étaient loin de réaliser le petit trésor d’outils et de connaissances qu’elles étaient en train de partager. Avec son accord et celui d’Éli (bien sûr, j’ai appris de la dernière expérience !), je te partage donc aujourd’hui ces échanges si enrichissants. Ainsi, j’espère que toi aussi tu comprendras mieux cette maladie et que tu dénicheras quelques outils pour t’aider à mieux comprendre les troubles alimentaires (et peut-être à les vaincre, si tu en souffres toi aussi).

Pour les proches, il n’est pas aisé de savoir comment bien réagir au problème. Doivent-ils insister pour faire manger, expliquer tout le non-sens de se restreindre ainsi ou, à l’inverse, critiquer les pertes de contrôle alimentaire? Parfois, devant l’inquiétude, l’incompréhension et l’impuissance, il peut être tentant de mettre une forte pression, de blâmer ou de juger les désordres alimentaires. L’impatience peut vite prendre toute la place! Donc, afin d’aider aussi tes proches à comprendre comment mieux réagir, tu trouveras à la fin du livre une courte section qui porte sur le sujet. N’hésite pas à la leur montrer !

Je te souhaite une très bonne lecture.

Raphaël

Psitt : J’ai quand même promis à Clara de m’attarder à certaines structures de phrases écrites rapide- ment, sous le coup de l’émotion... c’est son côté per- fectionniste ! Et bien sûr, j’ai élagué pour toi tous les courriels sans lien avec le sujet. Et crois-moi, il y en avait ! Je ne veux pas que tu y passes toute l’année, quand même !